Suivi de la reproduction

Des suivis de reproduction sont organisés régulièrement pour plusieurs espèces. Les méthodes diffèrent et doivent s’adapter aux particularités de la reproduction de chacune d’entre elles.

Suivi de la reproduction des grands salmonidés

Le suivi de la reproduction des grands salmonidés sur le bassin de l’Adour a lieu depuis 1970. A partir de 1992, après l’équipement de plusieurs barrages infranchissables, les possibilités de migration se sont étendues sur les gaves d’Aspe et d’Ossau. Puis progressivement, à partir de 1995, les parties amont du Saison, des Nives se sont ajoutées. De 1995 jusqu’en 2011, ce suivi de la reproduction reposait sur un suivi de sites témoins et des prospections sur une partie du linéaire restant et considéré comme « facilement » accessible.

Ces dernières années, un effort considérable a été entrepris en matière de libre circulation notamment avec la mise en place d’un plan national pour la restauration de la continuité écologique (annoncé le 13 novembre 2009) faisant suite aux objectifs européens et nationaux visant les restaurations de la libre circulation : DCE (Directive Cadre sur l’Eau), LEMA (Loi sur l’Eau et les Milieux Aquatiques), PGA (Plan de Gestion de l’Anguille), SDAGE Adour/Garonne.
Ces mesures ont eu pour effet d’améliorer potentiellement l’accès des têtes de bassin aux grands salmonidés.
De plus, un programme de restauration du bassin du gave de Pau a débuté en 2003 avec pour objectif la reconstitution rapide des stocks de Saumon atlantique. Cette rivière fait donc l’objet de mesures particulières en matière de soutien des stocks (alevinages) et restauration de la libre circulation.

Le contrôle exhaustif des frayères de grands salmonidés est impossible. En effet, il n’est pas possible de différencier les frayères de saumons, de truites de mer ou de grosses truites fario sauf si l’on observe des géniteurs sur le nid (chose relativement rare). De plus, les résultats obtenus sont fortement dépendants des conditions météorologiques et hydrologiques souvent défavorables à cette période. Enfin, la spécificité même de nos rivières (fort courant, substrat clair…) rend difficile le dénombrement des nids. Toutefois, le suivi de la fraie peut représenter un indicateur utile dans le suivi de la population de Saumon du bassin Adour.

Le contrôle de l’activité de la reproduction naturelle effectué par MIGRADOUR poursuit deux principaux objectifs :
• Suivre l’activité de reproduction des grands salmonidés sur des sites témoins « historiques »
• Suivre ponctuellement l’activité de reproduction et l’évolution de la colonisation par les grands salmonidés sur certains axes présentant des enjeux importants pour l’espèce (partie aval du gave d’Ossau, gave de Pau…)

Le suivi de la reproduction s’effectue par prospection visuelle (depuis la berge pour les sites témoins ou par bateau pour le suivi de la colonisation).
Lorsque des nids sont localisés, il est procédé à la géolocalisation de la zone par GPS (chaque zone ou point GPS constitue un site de frai) puis un dénombrement des nids est réalisé. Le nombre de géniteurs présents sur les nids est également relevé et consigné sur une feuille de terrain. L’ensemble des données de terrain (nom du site, nombre de nids par site, nombre de géniteurs par nid, météorologie du jour et turbidité de l’eau) est rassemblé dans un document Excel puis traité par analyse thématique sous SIG.

Suivi de la reproduction de la Lamproie marine

La Lamproie marine (Petromyzon marinus) est un migrateur amphihalin inscrit au plan quinquennal de gestion des poissons migrateurs (PLAGEPOMI) du COGEPOMI Adour (COmité de GEstion des POissons MIgrateurs de l’Adour). Bien que moins prisée sur ce bassin que sur la Garonne, l’espèce intéresse tout de même la pêcherie professionnelle de l’Adour.

 

Malgré cet intérêt, peu de données sont disponibles concernant la distribution de l’espèce sur le bassin de l’Adour. Depuis le début du 20ème siècle, l’aire de répartition de la Lamproie marine sur le territoire français s’est réduite et fragmentée, comme c’est le cas pour les autres poissons amphihalins, suite à la construction de barrages (rendant ainsi l’accès des géniteurs à de nombreuses zones de ponte difficile, voire impossible), l’altération du biotope (par extraction de granulat dans le lit mineur des cours d’eau, colmatage) et les pollutions diverses.

Ce phénomène de régression a déjà été observé chez d’autres espèces (Esturgeon européen, Saumon atlantique, Aloses, Anguille européenne…) et a conduit à la mise en place d’importants programmes d’études et la prise de mesures de conservation rigoureuses. Beaucoup moins étudiée que les autres espèces de migrateurs amphihalins, la Lamproie marine mérite néanmoins toute notre attention. Elle fait partie intégrante de la population ichtyologique du bassin de l’Adour, au même titre que les grands salmonidés ou les aloses.

Dans la perspective d’accroître les connaissances et de permettre une meilleure gestion de la ressource, Migradour s’est engagée depuis une quinzaine d’années à cartographier la répartition de la Lamproie marine sur le bassin de l’Adour. Plusieurs campagnes ont donc été engagées depuis et ont permis :
• De définir et actualiser les limites amont des zones de reproduction
• De définir un indice d’abondance du nombre de frayères par site
• De mettre en évidence des obstacles majeurs à la libre circulation de l’espèce dans le bassin Adour.

La méthode utilisée repose sur le dénombrement des nids de Lamproie marine sur un linéaire précis et ainsi d’observer les éventuelles évolutions/changements sur certains sites témoins entre chaque campagne (ayant lieu généralement tous les 5 ans).

Deux techniques de prospection sont déployées pour le repérage des nids :

• La principale, par descente de la rivière en bateau (canoë pneumatique), permet de passer sur l’ensemble des secteurs même sans accessibilité du bord. Elle permet également de prospecter rapidement les cours d’eau.
• La seconde, par prospection à pied depuis la berge ou en marchant dans l’eau. Ce type de prospection est utilisé principalement pour le « bornage » des limites amont de colonisation ou pour le suivi de sites témoins.

En bateau comme à pied, lorsque des nids sont localisés, il est procédé à la géolocalisation de la zone par GPS (chaque zone ou point GPS constitue un site de frai) puis un dénombrement des nids est réalisé. Le nombre de géniteurs présents sur les nids est également relevé et consigné sur une feuille de terrain. L’ensemble des données de terrain (nom du site, nombre de nids par site, nombre de géniteurs par nid, météorologie du jour et turbidité de l’eau) est rassemblé dans un document Excel puis traité par analyse thématique sous SIG (QGIS).
Les prospections se déroulent en général entre le début du printemps et le milieu de l’été (en fonction du régime hydrologique des rivières).

Les suivis réalisés ces dernières années ont ainsi mis en évidence un déficit de reproduction sur l’axe Adour en lui-même alors que ses principaux affluents étaient colonisés par l’espèce et que de nombreux nids et sites de frai avaient été observés lors des premiers relevés en 2003 / 2005. De plus ces suivis ont montré que de nombreuses limites amont de zones de reproduction se caractérisent par la présence d’un obstacle (barrage, digue…).

Suivi de la reproduction de la grande Alose

Historiquement, la grande Alose colonisait principalement les parties aval et moyenne de l’Adour (départements des Landes et du Gers) ainsi que l’aval du Gave d’Oloron, du Gave de Pau et de la Nive. Toutefois, à ce jour, la répartition de l’espèce entre les différents sous-bassins est mal connue. La grande Alose est essentiellement exploitée par la pêche professionnelle et amateur aux engins au moyen respectivement de filets et de carrelets. Une pêche à la ligne s’exerce principalement sur l’aval du gave d’Oloron et du Saison.

Les données de capture récoltées auprès des marins pêcheurs de l’estuaire de l’Adour montrent une importante diminution de la population à partir des années quatre-vingt (Lissardy et al., 2007).
Face à ce constat, dans la perspective d’accroître les connaissances et de permettre une meilleure gestion de la ressource, Migradour a entrepris un suivi ponctuel de la reproduction de l’alose à l’aval immédiat de trois ouvrages majeurs sur trois cours d’eau du bassin lors d’une campagne en 2012. L’objectif principal de ce suivi était de mieux connaître l’activité de reproduction sur des frayères «historiques» situées à l’aval de ces ouvrages connus comme pouvant potentiellement entraîner des retards à la migration et ainsi commencer à appréhender la fréquentation de l’espèce sur ces trois axes. Ce suivi devait aussi permettre de mieux caractériser l’activité reproductrice sur les rivières du bassin (période de reproduction, horaires d’activité…).

Le suivi de reproduction de l’alose est relativement simple et reprend des protocoles déjà largement utilisés ces dernières années. Il s’agit de dénombrer durant la nuit les bulls d’aloses par observation sonore. L’unité de temps utilisée est le quart d’heure. Le comptage des bulls permet d’estimer à la fin de la saison de reproduction le nombre de géniteurs (mâles et femelles) présents sur les différentes frayères.
Il existe deux types de protocoles appliqués au comptage des bulls : le comptage direct et le comptage indirect. Le comptage direct consiste à poster des agents sur la berge au niveau d’une frayère et de dénombrer par suivi auditif et visuel les remous à la surface de l’eau caractéristiques des bulls. Le comptage indirect est effectué à l’aide d’un récepteur placé sur la berge et relié à un enregistreur numérique. Le dépouillement des bandes son se fait à l’aide d’un logiciel spécifique qui retranscrit les sons des bulls en fréquences ce qui permet de comptabiliser les bulls sur le spectre d’enregistrement. Les deux méthodes sont complémentaires, le comptage direct permet d’être plus précis et l’enregistreur permet de surveiller un site sans présence humaine obligatoire.
Lors du suivi réalisé seuls des comptages directs ont été mis en œuvre en raison de la méconnaissance des sites et du caractère faible et aléatoire de l’activité de reproduction.
Au total, durant les nuits de suivi, 444 bulls ont été dénombrés. Après extrapolation des nuits partielles par la méthode de Cassou-Leins, le total des bulls sur les nuits de suivi est de 844 bulls. Ce qui représente une estimation d’environ 178 géniteurs.

L’activité de reproduction se caractérise durant cette étude par de fortes variations.
Ces variations du nombre de bulls s’observent entre les frayères d’un même site durant la même nuit mais également pour une même frayère entre plusieurs nuits successives. Aucune tendance saisonnière de l’évolution du nombre de bull n’a pu être mise en évidence d’après les résultats obtenus. Il est également difficile de mettre en évidence d’éventuelles relations entre les paramètres environnementaux mesurés (températures de l’eau, de l’air et débit) et l’intensité de l’activité de reproduction. Toutefois, ces paramètres environnementaux ne semblent pas avoir été un facteur limitant de la reproduction durant la période de suivi (températures moyennes supérieures à 15°C et débits relativement faibles).

La majorité des bulls ont été dénombrés sur le site de Sorde-l’Abbaye. Il est toutefois difficile d’attribuer les bulls dénombrés à la reproduction de la grande Alose en raison de la présence de l’Alose feinte sur ce site.
Seulement 7 bulls ont été dénombrés sur le site de Cauneille durant ce suivi.
Aucun bull n’a été comptabilisé sur l’Adour. Pourtant ce site est une frayère « historique » connue comme étant une frayère forcée en raison de la présence de l’ouvrage de Saint-Maurice en amont immédiat. L’absence d’activité de reproduction sur ce site est peut-être due à l’absence de géniteurs en raison d’un déficit de colonisation sur ce secteur situé assez en amont sur l’axe.

Parallèlement à ce suivi, Migradour a réalisé une étude qui a permis de géoréférencer les frayères potentielles de grande Alose sur les principaux axes du bassin de l’Adour.